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Histoire de création : Morgane – « Influenceuse » est un vrai métier créatif (2/2)

Edité par mon amie de longue date K.L.

« Les histoires de créations » est la nouvelle rubrique du blog, là où chaque saison de l’année, je vais à la rencontre d’une créatrice ou d’un créateur pour écouter son histoire. La création peut être le métier principal de nos invités, ou un parmi leurs métiers exercés, ou juste un pur hobby.

Avec les histoires de créations, j’espère casser les clichés qui creusent l’écart entre la vision du grand public sur les métiers créatifs et la réalité.

Personnage du printemps : Morgane du compte Instagram @morgane.mood

Cet article est la suite de l’article « Histoire de création : Morgane – « Influenceuse » est un vrai métier créatif (1/2) : Créatrice – Mère / créatrice – Educatrice / créatrice » publié le 5 avril 2022.

Dans cette deuxième partie de l’histoire de création de notre personnage du printemps, nous ferons le focus sur le métier d’influenceuse sur Instagram, le métier qui est trop souvent considéré comme « facile » et « vide » sur un réseau « qui prône des contenus superficiels ».

Deuxième partie

« Influenceuse » est un vrai métier. Et c’est un beau métier !

L’entourage – la base solide

An : Sur ton compte Instagram, on peut voir des photos de tes enfants. Comme je n’ai pas d’enfant, je ne peux pas donner une opinion là-dessus, mais je vois plusieurs commentaires négatifs chez les mamans-influenceuses sur le fait qu’elles montrent leurs enfants sur les réseaux sociaux. As-tu déjà eu ce genre de remarque ? Comment tu te sens face à ce sujet ?

Morgane : J’ai beaucoup réfléchi à la question.

Timi (mon premier enfant) a 10 ans, il est bientôt un adolescent. Dès que je poste une photo ou une story de lui, il les valide avant. Et il sait qu’à n’importe quel moment de sa vie, s’il veut que je retire toutes les photos de lui, je les retirerai toutes. C’est pareil pour Matt (mon deuxième enfant). J’en avais bien sûr parlé avec Guillaume (mon mari). Comme toujours, tout est réfléchi en famille.

J’ai toujours mis un point d’honneur à ce que ça ne devienne pas une téléréalité, en mode : Matt en couche, Matt sur les toilettes, Matt dans le bain… Je sais que les images une fois postées sur Internet peuvent rester même après la suppression volontaire et n’importe qui peut faire une capture d’écran.

Il y a des influenceuses qui sont rémunérées pour montrer leur bébé. C’est vraiment leur gagne-pain. Je ne suis jamais trop tombée là-dedans. Quand on fait des collaborations sur les produits pour les enfants, ce sont toujours eux qui choisissent avec moi.

An : Je me souviens de la façon dont Guillaume nous a montré ton compte avec beaucoup de tendresse et de fierté. (Guillaume et moi, nous étions collègues quand j’étais encore salariée). On voit ta petite famille sur ton compte, et on voit des reels que tu fais avec tes parents et ta sœur.

Est-ce qu’ils t’ont soutenue depuis le début ? Si tu n’avais pas tout ce soutien de tes proches, te lancerais-tu dans la création de contenus ?

Morgane : Dans ma famille, il y avait déjà ma petite sœur qui a sa marque d’habits et qui est influenceuse sur Instagram. 

Morgane et sa petite sœur Margaux

Au début je manquais beaucoup de confiance en moi. Avant chaque poste, j’envoyais à ma sœur pour avoir son avis. Elle était ma référence, parce que sur Instagram, il y a des codes à suivre que je n’avais pas. C’était tout un nouveau monde pour moi.

Concernant mes parents, plus le temps passe et plus je rencontre d’autres personnes de leur âge, plus je me dis que j’ai eu énormément de chance. Ils sont dans la soixantaine, mais ils sont très ouverts, et surtout très tolérants.

Mes parents sont toujours fiers de nous.

Je sais que j’ai beaucoup de chance d’être avec Guillaume parce qu’il est plus que bienveillant.

C’est sûr que non, je ne serais pas là si je n’avais pas cet entourage. C’est intéressant que tu m’aies posé la question car je me rends compte en le disant.

« Influenceuse » est un métier créatif

An : Quand j’ai dit à une copine que j’aimerais commencer cette rubrique d’interview par la rencontre avec une influenceuse, sa réaction était : “Mais où est le lien entre influenceuse et la créativité ?” C’est là où je me suis rendue compte que ce lien ne parait pas si évident dans l’imagination collective. Comment tu pourrais répondre à cette idée reçue ?

Morgane : Je suis influenceuse sur Instagram. Instagram était à la base une plateforme pour partager de jolies photos. Faire une photo est pour moi une création.

Etre influenceuse, c’est créer son univers pour mettre en valeur ce qu’on te confie. Tu retranscris tes valeurs dans ton univers et c’est ça qui finira par influencer. C’est un vrai travail.

Moi-même, j’ai mis beaucoup de temps à me questionner “En fait ça veut dire quoi « être influenceuse » ?” Et je me suis rendue compte au fur et à mesure des stories, des posts suite auxquels les gens m’ont écrit pour dire “Tu m’as fait penser à ceci, à cela…” Pour moi c’est ça influencer !

Ce n’est pas péjoratif, ce n’est pas mal d’influencer quelqu’un si le message derrière transmet de belles valeurs.

An : Ton feed Instagram est toujours homogène avec une palette de couleur qui est reconnaissable. Comment tu fais quand le produit de la marque avec qui tu collabores a une couleur qui n’a rien à voir avec les photos que tu fais d’habitude et risque de casser ton feed ?

Les photos prises par Morgane pour les posts en collaboration avec les marques

Morgane : J’utilise Lightroom pour éditer les photos. J’ai toujours le même filtre. Je mets contraste chaud, puis, soit je mets « auto » soit non, et ensuite, je vais retravailler la lumière, puis je remets de la netteté et les détails. Tu vois, je connais tout par cœur !

Je peux passer une heure à sortir une photo pour du thé, qui va être très peu liker ☺   Je ne veux pas que ce soit : « Tenez, c’est le produit, j’ai goûté ça, c’est super bon, achetez-le, voici le code promo ! »

Et bien sûr que les produits ne sont jamais de la même couleur que mes photos de bases. Par contre, je fais en sorte que la couleur d’origine ne change pas. J’essaie de trouver un moyen pour que ce soit assez homogène.

Et encore, mon feed n’est pas si homogène, mais c’est un bon mélange entre les moments de vie, le paysage, la nature, et les produits. Je pense que j’ai mon style de photo et que mon univers, mes éléments, ce que j’aime vont toujours transparaître dans les photos.

Aujourd’hui, je suis ambassadrice pour la compagnie européenne du parfum, Cepparfums. C’est une entreprise dijonnaise qui crée des parfums naturels. Je pense qu’ils ont été attirés par mon compte parce qu’ils ont apprécié mes photos et mon univers.

Des fois, faire une stories pour une marque peut me prendre longtemps, parce que j’ai consciente qu’il y a des gens derrière qui ont créé le produit. Je ne prends jamais la mission à la légère.

Bien sûr qu’au début c’était compliqué. Au début tu acceptes certaines collaborations uniquement parce que tu sais que ça va marcher. J’ai de la chance que les marques préfèrent maintenant les petits comptes avec des vrais engagements.

An : Je trouve que tu partages beaucoup avec tes textes aussi, y compris les textes pour présenter les produits. C’est concret et personnel. On voit que ce n’est pas un script que t’as copié-collé…

Morgane : Tout à fait, parce qu’on nous envoie ça, les scripts ! On a un deadline aussi, on ne peut pas poster n’importe quand. C’est pour ça que je travaille mes photos parce que c’est à peu près là où j’ai la liberté, et encore, on nous donne des consignes à respecter. Des fois je ne prends pas des produits parce qu’on est obligé de se filmer en train de mettre la crème.

Je teste vraiment des produits. Par exemple, récemment, j’ai parlé du nouveau produit de The Body Shop. Je l’utilise vraiment contre les situations stressantes, par exemple lors des bouchons. J’ai vraiment peur des bouchons sur l’autoroute. Et ça casse un peu l’image lisse et parfait sur les réseaux. Nous, les humains, nous avons tous des peurs, des émotions. Et c’est ça que je veux transcrire.

Le post sur la nouvelle gamme de The Body Shop

An : Au tout début, comment tu faisais pour obtenir les collaborations ? Elles sont arrivées à toi et tu as saisi l’opportunité ou c’est toi qui avais une idée et tu allais vers la marque qui y correspond ?

Morgane : J’ai deux façons d’avoir des collaborations.

Je suis sur des applications d’influenceurs et de marques. Les marques mettent le produit. Et nous, on confirme si oui ou non on a envie de faire des posts ; et ensuite les marques décident si elles nous envoient ou pas les produits.

Sinon, sur Dijon, il y a des marques qui viennent me chercher.

J’achète toujours chez des créateurs, créatrices quand j’ai envie d’offrir des cadeaux, tout simplement parce que j’apprécie ces créations et je souhaite soutenir les petits commerces. Au début, j’ai mis sur Instagram mes achats. Et puis la créatrice m’a écrit pour me demander si je souhaite faire un jeu concours. Je trouve que le jeu concours est le meilleur moyen pour faire grandir le compte.

Il y a aussi ma sœur qui m’a emmené sur des événements où j’étais son + 1. Et je la remercie pour me faire rentrer un peu dans le “réseau” des influenceuses dijonnaises.

Ce qui est bien avec Instagram aussi est que tu peux être reposté, partagé. Comme je prends beaucoup la ville en photo, la ville de Dijon m’avait proposé un contrat pour la période de Noël.

Je suis également ambassadrice pour la Toison d’Or. Ça fait énormément de visibilité. Parce qu’on est que quatre influenceuses et sur les quatre, c’est moi qui ai le moins d’abonnés, donc forcément les autres me tirent vers le haut car quand elle repartage mon jeu de concours, ça me fera aussi plein de visibilité.

Morgane.mood – ambassadrice de la Toison d’Or

An : Est-ce que tu as suivi des formations qui t’ont aidé à arriver à ton niveau en tant que créatrice ?

Morgane : J’ai eu une seule petite formation photo au tout début de mon métier d’éducatrice pour faire la médiation thérapeutique photos avec les adolescents.

Je n’ai pas eu de formation Instagram, je suis autodidacte. C’est mon père qui est complètement autodidacte qui m’a transmis cette envie et cette capacité d’apprendre les choses moi-même.

Je suis sur la photo de l’instant, je peux rester trois quarts d’heure planter devant un arbre si je veux prendre un oiseau que j’ai vu il y a trois quarts d’heure.

La photo, j’en fait aussi à côté, j’ai des personnes à qui je fais des shootings pour leur Instagram ou pour leurs mariages. Et souvent j’explique que je ne vais pas faire les photos posées. Ce sont vraiment les instants, les émotions que je vais essayer de capter.

C’est également ce que j’explique quand je fais la médiation photo avec les adolescents. Observer, ça fait partie de la pleine conscience.

Futur, passé et présent

An : As-tu déjà imaginé ton futur dans les années qui viennent ?

Morgane : Oui. Parce que mon métier en tant que éducatrice spécialisée l’ado-psychiatrie est difficile, et que Timi est en train de devenir adolescent. C’est très dur parce que je réfléchis toujours à chez nous, à comment nous fonctionnons.

J’ai toujours dit que quand Timi serait adolescent, ce serait compliqué de continuer à travailler avec des adolescents.

Je suis bien dans mon travail, c’est super mais j’avoue que j’ai toujours aimé le lien bébé-maman. J’aime aussi travailler sur les groupes de parole parents. Je suis vraiment formé à ça. C’est ce que j’aime faire, c’est ce que je sais faire.

Si je peux rêver, mon futur sera d’être dans une sorte de maison de bien-être avec différents professionnels où moi je pourrais être là en tant qu’éducatrice pour recevoir les familles.

Mais sinon je pense que je vais peut-être revenir au plus petit enfants dans un autre service social à la Chartreuse (là où je travaille actuellement).

Et Instagram, ça s’arrêtera un jour, et je me dis ce n’est pas grave.

An : Qu’est-ce qui te booste le plus durant ton parcours de créatrice ?

Morgane : Il y a des femmes que j’admire en tant que photographe durant les périodes d’après-guerre, comme Diane Arbus ou Vivian Maier. Elles font de la photo alors que ce n’était même pas un métier.

Je pense aussi à Katherine Switzer, la première femme qui a couru le marathon de Boston.

J’admire aussi l’artiste Lena Dunham avec sa série Girls qui parle ouvertement des sujets tabous.

Ces femmes n’ont pas attendu après les autres pour faire ce qu’elles ont envie.

An : Quel est le pire conseil que tu as reçu durant ton parcours de créatrice ?

Morgane : Je pense au moment où j’ai fait ma formation de photo et qu’on m’a dit : « Là, pour prendre un portrait tu vas devoir mettre ton appareil photo sur ça, et faire ça, et faut que ta focale, elle soit comme ça, et là, tu auras une belle photo ! » Mais ce n’est pas ça une belle photo ! Une belle photo est celle qui peut transmettre des émotions et même un peu de poésie.

 An : Si tu as un conseil à donner à celles et ceux qui veulent être créatrices / créateurs ou influenceuses / influenceurs comme toi, que dirais-tu ?

Morgane :Avant d’aller rencontrer l’autre, il faut déjà rencontrer soi-même. Comme ça, même quand ça ne marche pas, tu seras toujours en phase avec toi-même.

An : Je signe toujours mes articles avec la phrase « Keep creating! » Et je pense que ce serait cool si l’invité pouvait ajouter sa phrase ou son slogan à côté. Quelle sera ta phrase pour la fin ?

Morgane : Je vais paraître clichée mais tant pis ! Ce sera « Carpe diem ». C’est complètement lié à mon état d’esprit du moment, de vivre l’instant, parce qu’on ne sait pas ce qui va se passer après. C’est la pleine conscience, et là avec toi j’ai été vraiment pleine de conscience.

Pour moi c’est ça la richesse de la vie.

Vous pouvez retrouver Morgane sur Instagram

Carpe diem & keep creating!

Tu Ha An

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