Je n’ai jamais acheté de tasse pour moi-même, jusqu’à cette semaine.
Cette semaine, je me suis achetée la tasse Clinton Hill, une pièce faite main chez Amour Amour, pour le prix de 35 euros, plus 8 euros de frais de livraison.
Je consomme énormément de boisson chaude tout au long de la journée, été comme hiver. Je bois du thé pour réfléchir, du café pour rester éveillée, du chocolat chaud pour la bonne humeur, de la tisane pour me détendre, du latté pour jouer la barista (et du grog de temps en temps…)
Pour cette raison, les tasses sont presque omniprésentes dans mon quotidien, surtout dans ma nouvelle vie d’illustratrice. Depuis que je travaille à temps plein de chez moi, les boissons chaudes deviennent également une solution contre la sédentarité. Je me lève régulièrement de ma chaise pour remplir ma tasse (et évidemment, pour aller aux toilettes :p)
J’avais une quinzaine de tasses qui m’ont toutes été offertes. Même quand elles sont sur l’étagère, elles sont remplies d’affection. J’ai un plaisir fou d’en prendre une au hasard chaque jour pour une douceur du petit matin, pour les invités lors d’un goûter ou pour une soirée cocooning.
Mais quand il faut en prendre une pour m’accompagner pendant la journée de travail, le choix devient beaucoup plus strict. Il faut qu’elle soit stable, pour minimiser le risque de renversement sur les planches d’aquarelles. Il faut qu’elle soit facile à saisir, pour ne pas me sortir du flow. Il faut que je puisse la prendre sans me brûler, car mes mains sont mes premiers outils de travail et je me vois mal expliquer à mon client que j’ai fini sa commande avec la bouche car j’ai eu un accident avec ma tasse…
Oui, je suis difficile. Et aucune de mes tasses d’amour ne répondait à tous ces critères.
Jusqu’au jour où je suis tombée par hasard sur une photo de la tasse artisanale Clinton Hill d’Amour Amour.
Peut-être que pour certains, dépenser l’équivalent d’une semaine de course pour une personne dans une simple tasse paraîtrait futile ! Et je comprends totalement, car, plus jeune, j’avais la même réflexion. De plus, ma nouvelle tasse ne donne pas un meilleur goût à mon thé.
Cependant, je pense que la somme qu’on est prêt à payer pour un objet dépend de la vision et du besoin de chacun. Nous pouvons acheter un objet uniquement pour son utilité. Mais nous pouvons tout à fait y investir en cherchant d’autres valeurs telles que la qualité, la rareté, ou l’approbation sociale…
Si nous faisons le focus sur l’utilité, il n’y a aucune raison d’acheter un sac Hermès avec 4 chiffres devant la virgule, alors qu’on peut trouver des sacs à 10 euros tous les matins au marché du quartier. Alors, bien sûr, je ne dis pas que c’est de l’argent jeté par la fenêtre juste pour se donner une meilleure image de soi. Je suis consciente que derrière ce prix, il y a du savoir-faire, de la qualité de la matière première, des techniques utilisées, un souci du détail, qui sont tous nécessaires à la fabrication de chaque pièce (qui sont d’ailleurs très bien expliqués par Anh de Tour du Monde 5 continents).
Mais je ne suis pas plus attirée par les sacs Hermès pour autant. Dans la vie de tous les jours, je n’ai pas besoin d’un sac d’une aussi bonne qualité (et je n’ai certainement pas le budget pour cela!) Mais une tasse de la même qualité que celle d’Amour Amour va certainement faciliter ma vie d’illustratrice (qui, d’autant plus, ne me ruinerait pas!)
J’ai l’impression que la fast fashion et la culture de la surconsommation nous font croire qu’un T-shirt coûte 10 euros “en temps normal”, qu’une affiche coûte 10 euros “en temps normal”, qu’une tasse coûte 10 euros “en temps normal”, et que c’est “scandaleux” de vendre une tasse à 35 euros. Alors que c’est juste des stratégies de production, parfois non éthiques, qui se font concurrence pour mettre au marché des produits aux prix les plus bas, et par conséquent, font basculer la perception de ce qu’est un prix “raisonnable” qu’un consommateur soit prêt à payer.
Ces remarques me touchent personnellement aujourd’hui, car je fais partie des entrepreneurs indépendants qui cherchent tant bien que mal l’équilibre entre fixer les prix à la juste valeur et suivre les prix du marché. J’aimerais adopter l’attitude que je souhaite recevoir de la part de mes futurs clients. Et je rêve que mes futures créations trouvent leur adoptant, comme la tasse Clinton Hill m’a trouvée.
Bien sûr, je ne dis pas qu’il faut acheter uniquement chez les petits créateurs, et arrêter d’acheter des pièces produites à la chaîne. Tout dépend de l’envie, du besoin et du budget de chacun.
En parlant de budget, il y a sûrement des personnes qui pensent que je devrais être à l’aise financièrement pour me procurer un tel bijou.
Cependant, comme je l’ai brièvement abordé plus haut, je ne roule pas sur l’or. Plus concrètement, depuis cinq mois, je n’ai plus de salaire fixe qui tombe. Je suis au tout début d’une nouvelle activité, et pour des raisons administratives, je ne peux pas encore changer de statut pour commencer à prospecter. En réalité, il y a une semaine, j’étais en panique en réfléchissant à ma situation financière alors qu’il n’y avait pas de raison rationnelle. Même si la « An » du passé avait déjà tout calculé, économisé et préparé pour aujourd’hui, cela n’a pas empêché la « An » d’aujourd’hui de ne pas être complètement rassurée. Des fois, bêtement, je pense que je n’ai rien fait de brillant depuis cinq mois. J’ai tendance à me priver de plaisir tant que je n’ai pas encore atteint un objectif, parce que je ne pense pas mériter de l’amusement, de la gratification ou même du repos.
La tasse était un cadeau pour moi-même, avec la promesse de savourer aussi le chemin et non seulement la destination.
Pour ces raisons, et certes, à ce prix-là, vous pouvez être certains que je ferai doublement attention à ne pas la casser !!! J’avoue que je vais hésiter un peu avant de la prêter. Je ne l’apporterai certainement pas dans un open-space. Et je vais sûrement la cacher quand un enfant vient à la maison ! :p
J’ai payé 43 euros pour une tasse, ou plus exactement, pour un accompagnement en douceur sur mon aventure de nouvelle illustratrice.
Keep creating!
Tu Ha An
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